Partenaires, je vous aime !

© Xavier COQUELLE - Avril 2003

Une société partenaire, c'est une société qu'on ne peut pas encore bouffer ou tuer.

Cette définition pragmatique résume ce bel esprit qui règne bien souvent dans le monde des affaires. Le partenariat est une affaire d'intérêt, c'est sûr. Mais l'intérêt d'une entreprise, c'est quoi ?

J'entends encore raisonner à mes oreilles avec une grande émotion cette phrase miraculeuse d'un vrai consultant inspiré lors d'un séminaire de Direction auquel je participais :

"La vocation d'une entreprise est de rémunérer ses actionnaires".

Youpi !
A l'époque, le PDG était aussi ému que moi, mais pas dans le même sens.
Bon, ils étaient au moins deux à avoir cette haute compassion envers des partenaires privilégiés : les petites vieilles du Kentucky qui sont les principales actionnaires de l'économie mondiale via les fonds de pension US.
Nos deux cadres supérieurs, eux au moins, avaient un sens concret de l'objectif d'équilibre socio-économique mondial : satisfaire le besoin de mitaines. Et ils ont raison !
Le grand groupe Européen dans lequel oeuvrent ces deux humanistes fabrique plus de missiles que de mitaines. La valeur de son action à chuté de moitié entre 1999 et aujourd'hui.

Une société doit nécessairement s'inscrire dans une viabilité économique qui à mon sens pourrait être résumée comme suit : le fric qui entre doit être supérieur ou égal au fric qui sort.

Un partenaire professionnel dans le modèle " économique " actuel est effectivement celui qui peut vous générer du cash.

Mais où ce cash se cache-t-il dans le partenariat ?

Dans le jeu de Monopoly ?
J'achète la rue de la Paix, je mets un hôtel rue Saint Denis et je nique les autres joueurs !
Dans la triche ?
Pour sûr, ça aide vraiment !
Je rachète la banque parce que j'ai plus de fric qu'elle et qu'au Monopoly, il n'y ni assurance ni garagiste.
Ce genre de jeu mène à un résultat intéressant. Les autres joueurs vont se faire une bière devant un match à la télé. Le gagnant passe le reste de la journée seul devant la table de Monopoly à compter sa monnaie.
Le fait est que dans un tel cas, le partenariat est du côté de la bière.

J'aurais pu prendre les Richesses du Monde comme exemple. En adaptant un peu c'est encore plus parlant.
Je prends le contrôle des industries d'armement US, je vends sur les marchés de fait, par exemple le moyen orient, car les pays alliés ne sont pas des partenaires mais des concurrents.
Là on voit de mieux en mieux le cash … mais de moins en moins le partenariat. Le résultat du jeu est le même que pour le Monopoly, avec un peu plus de bières peut être.

Tout ça n'est qu'un jeu de cash cash !
Fast food de l'art culinaire en doses individuelles, il n'y a pas là de gâteau à partager entre partenaires. L'économie est ailleurs, le partenariat aussi.

Un partenaire pourrait être quelqu'un qui s'inscrit dans votre stratégie … et réciproquement ?

Stratégie ?
Aïe, Aïe, Aïe, C'est quoi déjà ?

  • Devenir leader mondial dans son domaine ?
  • Rémunérer ses actionnaires ?
  • Faire le maximum de pognon dans le minimum de temps ?
  • Niquer le maximum de concurrents et empêcher quiconque de le devenir ?
  • Réduire ces putains de charges pour améliorer au plus vite le résultat net ?

Bien que ces idées soient fortement développées actuellement : non, désolé, cela ne relève pas de la stratégie !
Ce me semble plutôt être des axes de raisonnement qui empêchent toute notion de stratégie.

Stratégie = vocation, culture, métier … dans un contexte

Euh ? …OK !
La stratégie pour une entreprise c'est chercher à répondre à ça : "où cours-je, où vais-je, dans quel état j'erre ?"

Le partenaire serait dès lors celui qui se pose des questions stratégiques de la même façon que vous ?

Vous doutez peut être : La stratégie c'est la question ou la réponse ?
Ne doutez plus !

La stratégie doit nécessairement être stable pour pouvoir mener à des résultats réels et concrets.
Et comme il est certain que la question est plus pérenne que la réponse : la stratégie, c'est donc la question (CQFD).

La réponse stratégique relève de la communication institutionnelle. Cette réponse est comme une photographie tandis que la question stratégique ressemble plus à un film !

Partager une communication institutionnelle ou des réflexions stratégiques ?

Des partenaires peuvent partager la même communication institutionnelle, mais les mauvaises langues diront alors que ce sont des concurrents. Ca fait peur !
Entre partenaires, si nous nous posons les mêmes questions de la même façon, si nous nous exprimons par des réponses différentes, complémentaires, nous gagnons le droit d'ajouter un terme des plus jolis à notre communication institutionnelle : synergie. Ca rassure !

Nico, Jaco et les autres.

Il y a quelques jours, je discutais partenariat avec Nico. C'était splendide à quel point nous nous posions les mêmes questions avec des éléments de réponse totalement différents : riche quoi !
Avec Jaco, cela fait des mois que l'on se pose ensemble les mêmes questions relativement à notre partenariat. Des réponses ? Non, pas de réponse à l'horizon. Mais alors quelle stabilité et quelle intensité Hitchcockienne dans les questions ! Quelle conviction aiguë de l'intérêt pour tout le monde de notre collaboration !

J'ai rencontré d'autres personnes avec lesquelles nous partagions des réponses communes mais pas nécessairement les mêmes questions : mauvais feeling !

J'en ai rencontré d'autres qui ne sont intéressées à discuter partenariat que sur une affaire signée. Je me mets à la place du pauvre client : il suffit de payer, après on verra bien ce qu'on peut faire !
Bref : pas de feeling du tout !

Nico, Jaco m'enrichissent … il n'est pas impossible que cela soit réciproque.

Collaboration enrichissante ?

Et si nous ajoutions un élément pour partager cet enrichissement : un client par exemple ?
Ce client deviendrait presque un partenaire lui aussi !
S'il s'enrichit avec nous, nous allons plus lui plaire que les petites vieilles du Kentucky !
Il va peut-être nous en donner un peu aussi de son cash ?

Collaboration enrichissante, intérêt mutuel, bon feeling ?
Voilà donc une autre forme de cash !

Deviendrais-je sentimental ?
Non, je le reste !
L'argent, les affaires, çà va, ça vient … très instable. Mes bons sentiments au moins sont stables … ils sont dans mes valeurs fondamentales, plus stratégiques et constructifs que mon portefeuille.

Un partenaire pour moi, c'est dès lors :
quelqu'un qui partage mes sentiments et mes interrogations
et qui est prêt, si l'opportunité se présente, à partager le tout avec un client.

Subjectif et revendiqué !
D'où le corollaire :

Partenaires, je vous aime !

 

 

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